Upper Fort Garry et le gouvernement local
Au 19e siècle, Upper Fort Garry a influencé le développement de la vie politique, économique et sociale dans le Nord-Ouest, symbolisant l’autorité de la Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH) dans l’Ouest canadien, et, plus précisément, au chapitre de la gouvernance de la colonie de la Rivière-Rouge.
À part son importance commerciale, Upper Fort Garry constituait également le siège de l’autorité civile et judiciaire dans la colonie de la Rivière-Rouge. La gouvernance au sein de la colonie, établissement multiculturel de Premières nations, de Métis et de colons euro-canadiens, reflétait les positions d’une classe dirigeante exclusive et reconnaissable. Cette dernière regroupait en grande partie des chefs de la CBH qui gouvernaient par l’entremise du Conseil d’Assiniboia. Celui-ci était composé d’officiers de la compagnie, de membres du clergé local et de « colons éminents », chacun d’entre eux nommé par la compagnie et agissant, plus ou moins, dans son intérêt. Dans la colonie, le Conseil détenait le pouvoir législatif, administratif et judiciaire. Il tentait de faire respecter à la fois le monopole de la compagnie sur le commerce et un système judiciaire constitué de magistrats, de la Cour générale des sessions trimestrielles, d’un service de police et d’une prison.
Le Conseil se réunissait plus ou moins régulièrement à Upper Fort Garry, mais il s’est progressivement déconnecté des nombreux habitants de la Rivière-Rouge, plus particulièrement de la population croissante de Métis anglophones et francophones qui avaient établi une économie unique basée sur l’agriculture, la chasse, le transport, l’approvisionnement et le commerce. Cependant, à mesure que la Rivière-Rouge s’ouvrait au monde extérieur à la fin des années 1850, la colonie subissait de nouveaux changements par suite de l’arrivée d’annexionnistes déterminés à étendre le contrôle du Canada à l’arrière-pays de l’Ouest. C’est le Parti canadien qui, par le biais de son hebdomadaire, le Nor’Wester, manifestait le plus son opposition à la CBH et aux Métis de la Rivière-Rouge. Enfin, au cours des tentatives de transfert de la Terre de Rupert au Canada en 1869, la lutte des Métis pour la reconnaissance de leurs droits politiques et fonciers traditionnels a mené à la rébellion. Sous le leadership de Louis Riel, les Métis parlant français et le métchif ont occupé Upper Fort Garry en novembre 1869. C’est là que Riel a rencontré Donald Smith, délégué du gouvernement du Canada, pour discuter de l’avenir de la colonie et en fait, de l’ensemble du Nord-Ouest. La décision de Riel de travailler avec une assemblée représentative (d’abord un groupe de 40, puis un groupe de 24) a permis que la paix et l’unité relative soient préservées dans la colonie de la Rivière-Rouge. En mars 1870, autorisant l’exécution de Thomas Scott, prisonnier canadien indiscipliné, Riel a causé un certain émoi sur la scène politique en Ontario, mais le débat n’a pas perturbé les affaires à la Rivière-Rouge. Les Métis anglophones de la colonie ont siégé avec leurs homologues francophones à l’Assemblée législative d’Assiniboia et, agissant en tant que représentants responsables de la communauté, ils ont unanimement approuvé la Loi sur le Manitoba au Canada et l’entrée du Manitoba dans la Confédération comme première province. À la fin de l’été, Riel a été forcé de fuir la colonie avant l’arrivée des troupes du colonel Garnet Wolseley.
La décision prise par les habitants de la Rivière-Rouge de faire partie du nouveau dominion a facilité la consolidation du reste du nord-ouest de l’Amérique, dont l’Intérieur ouest (1870), la Colombie-Britannique (1871) et l’Arctique (1880), en une seule nation transcontinentale.
Upper Fort Garry a abrité jusqu’en 1883 la Maison du gouverneur et la résidence du lieutenant-gouverneur de la province.
La décision prise par les habitants de la Rivière-Rouge de faire partie du nouveau dominion a facilité la consolidation du reste du nord-ouest de l’Amérique, dont l’intérieur ouest (1870), la Colombie-Britannique (1871) et l’Arctique (1880), en une seule nation transcontinentale.
Le fort
En tant que centre du commerce officiel et du gouvernement civil dans la région pendant depuis environ cinq décennies, Upper Fort Garry en est venu à symboliser l’autorité de la Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH) dans le Nord-Ouest. Il est ensuite devenu le siège du gouvernement provisoire, puis, pour un certain temps, le centre administratif de la nouvelle province. Bâti en 1835 et agrandi en 1851, le nouveau fort reflétait la volonté de la compagnie de représenter son pouvoir et prestige sur la Terre de Rupert. Les murs de calcaire de la première section faisaient quatorze pieds de hauteur et comportaient quatre grands bastions de pierre. Les bâtiments à l’intérieur – les entrepôts de fourrures et de provisions, le magasin général, ainsi que le logement réservé aux officiers, aux hommes et au juge en chef – suivaient une configuration de base en forme de H, commune à d’autres postes de la CBH munis de palissades en bois, et rappelant le modèle du grand hall lors de la construction de châteaux au début du Moyen Âge. (D’autres bâtiments tels que le palais de justice, la prison, certains ateliers et une écurie se trouvaient à l’extérieur des murs.) La construction en calcaire constituait une défense pour la compagnie contre un ennemi légèrement armé et à cheval, et offrait une protection contre les inondations dévastatrices et les feux de prairie. Peut-être plus important encore, les murs et les bastions de calcaire contribuaient à renforcer le pouvoir et l’autorité de la CBH dans la région. Cependant, à mesure que l’influence de la compagnie diminuait dans la seconde moitié du 19e siècle, ces symboles de dominance en pierre ont été démantelés.
À partir d’Upper Fort Garry, on a vu naître un nouveau commerce, représentant un défi pour le monopole de la CBH dans l’ancienne colonie et, plus tard, se développer Winnipeg et une économie émergente fondée sur l’approvisionnement, la fabrication et le transport.