Upper Fort Garry et les Premières nations
Des milliers d’années avant la construction d’Upper Fort Garry et même plusieurs millénaires avant l’arrivée des commerçants de fourrures au confluent des rivières Rouge et Assiniboine, les peuples autochtones fréquentaient déjà le site : ils y pratiquaient des échanges et s’y rassemblaient en vue d’excursions d’un bout à l’autre des prairies et de la forêt-parc. Il s’agissait d’un carrefour dans la circulation des personnes, de la culture et des ressources dans toute la moitié ouest de l’intérieur de l’Amérique du Nord. Les postes de traite de fourrures qui allaient ultérieurement émerger sur le site au cours des années où la traite des fourrures faisait rage, et finalement la construction d’Upper Fort Garry, reflèteraient l’importance géographique d’un endroit situé à cheval sur deux trajets de rivières majeures.
Cela a également été un endroit où les histoires des peuples autochtones et non autochtones se sont entrecroisées. Alors que les Ojibwés maintenaient davantage de liens étroits avec les commerçants européens, les Cris et les Assiniboines récoltaient également les ressources de la région. Durant les premières années de la colonie de la Rivière-Rouge, les liens demeuraient forts entre le chef Peguis, son peuple, la Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH) et les premiers colons. Le traité de Selkirk en 1817 représentait une preuve tangible du respect et des bonnes relations entre les Ojibwés, les Cris et les nouveaux arrivants écossais. Associés aux colons et à la CBH contre la Compagnie du Nord-Ouest, les Ojibwés ont entretenu des liens étroits avec la compagnie à La Fourche, même après la fusion de 1821. Avec le temps, cependant, la relation privilégiée entre les Ojibwés et la CBH s’est détériorée, car les termes du traité initial étaient ignorés par les commerçants euro-canadiens d’Upper Fort Garry. Au début des années 1860, Peguis devenu vieillard a publié son « manifeste indien », dans lequel il réclamait des droits en faveur des colons qui avaient utilisé du terrain au-delà de la bande de deux miles qui leur avait été cédée en 1817. Plus tard, il déclarerait que le traité de 1817 n’avait été qu’un accord temporaire entre les deux parties. En insistant sur la question des droits fonciers, Peguis a montré qu’il a bien saisi toutes les conséquences de l’afflux imminent de colons blancs dans l’Ouest.
En dépit de cette rancune, les Ojibwés, alors installés au nord de la colonie, se rendaient régulièrement à Upper Fort Garry pour effectuer des échanges et rencontrer les groupes de passage. L’arrivée des Dakotas (Premières nations) à Upper Fort Garry en décembre 1863, chassés du territoire américain après les guerres du Minnesota, a suscité la peur parmi les gens du pays en raison du potentiel guerrier existant entre les Dakotas, les Ojibwés et les Métis, ennemis depuis des générations. Malgré ces inquiétudes, et un ou deux incidents de violence, aucun combat à grande échelle n’a éclaté.
Dans le cadre des événements de 1869-1870, se souvenant de leur alliance de longue date avec la CBH à La Fourche et conscients des changements à venir dans le Nord-Ouest, les Ojibwés, alors sous la direction du fils de Peguis, Mis-koo-kenew (nom chrétien : Henry Prince), ont refusé de prendre le parti de Riel et des Métis. Mais comme le pouvoir politique se déplaçait du Manitoba vers Ottawa, les Ojibwés se sont détachés encore davantage du centre de la colonie. Prince a signé le Traité 1 en 1871, de même que les dirigeants autochtones des Moskégons qui avaient immigré à la colonie depuis des communautés nordiques.
Quelque quatre décennies plus tard, les anciens alliés des premiers colons seraient escroqués de leurs riches terres agricoles à St. Peters et poussés vers les terres pauvres de leur réserve actuelle d’Entre-les-Lacs. À mesure que l’ancienne colonie se transformait en communauté suburbaine, ses habitants d’autrefois, les peuples des Premières nations, étaient relégués aux lisières géographiques et culturelles de l’Ouest en développement.